Le virus du sida relève-t-il de la science-fiction?
La cause du SIDA serait à trouver dans un comportement
immunosuppresseur et non pas dans le virus HIV.
Peter H. Duesberg et Bryan J. Ellison
Le 5 juin 1981, un rapport publié par le CDC (Centers for Disease
Control) alarmait la communauté médicale des Etats-Unis.
Ce rapport décrivait cinq cas médicaux inhabituels observés
d'octobre à mai 1981. Les cinq individus avaient développé
une pneumonie de type Pneumocystis carinii. Le P. carinii est un microbe
présent dans les poumons de la plupart des gens bien-portants,
cependant il peut provoquer la maladie en cas d'affaiblissement sérieux
du système immunitaire. Dans les cas de ces cinq personnes, l'immunosuppression
était confirmée par la présence de plusieurs autres
infections opportunistes. Les autorités médicales furent
particulièrement surprises par l'identité des patients:
ces cas de déficience immunitaire grave étaient tous des
hommes de vingt à quarante ans, une classe d'âge considérée
comme typiquement saine. Tous ces hommes étaient homosexuels.
Le 28 août un rapport consécutif du CDC énumérait
21 autres cas présentant les mêmes sévères
problèmes de suppression immunitaire. Parallèlement
à la pneumonie à P. carinii, à la candidose
oesophagienne (une levure pathogène), et à d'autres
maladies typiques des déficiences immunitaires, certains
de ces patients étaient atteints d'une affection peu commune
appelée sarcome de Kaposi. Ce dernier est une tumeur des
parois internes des vaisseaux sanguins qui se manifeste par des
lésions cutanées rougeâtres. Le CDC appelait
ces patients aux étranges combinaisons pathologiques des
"hommes homosexuels antérieurement sains". Un
nombre croissant d'hommes sains n'étant normalement pas
amené à développer simultanément des
maladies graves, on en vint à définir l'ensemble
des affections observées chez ces hommes comme un syndrome
auquel on supposait une cause sous-jacente unique. D'abord appelé
Gay-Related Immune Deficiency (GRID), le syndrome fut finalement
connu sous le nom de Syndrome Immuno-Déficitaire Acquis,
ou SIDA.
Depuis que ce syndrome a été défini pour
la première fois, le SIDA a été diagnostiqué
sur plus de 130'000 Américains. 80'000 d'entre eux sont
morts. Les homosexuels de sexe masculin continuent à constituer
le plus important groupe à risque de SIDA, mais les utilisateurs
de drogues intraveineuses, les destinataires de transfusions sanguines
et les hémophiles ont aussi été inclus au
nombre des victimes. Depuis 1981, la liste des maladies symptomatiques
du SIDA a été étendue par le CDC et comprend
la pneumonie à P. carinii, la tuberculose, le sarcome de
Kaposi, la démence, le lymphome, la candidose, la diarrhée
- au total plus de 25 maladies conventionnelles. La plus couramment
diagnostiquée d'entre elles est la pneumonie à P.
carinii, qui a été observée dans environ
53% des nouveaux cas de SIDA l'année dernière, suivie
par le wasting syndrome (19% des cas), la candidose (13%), le
sarcome de Kaposi (11% des cas) et la démence (6%).
L'augmentation des subventions fédérales a suivi
celle du syndrome. Dans les premières années de
l'épidémie, les dépenses se chiffraient à
quelques millions de dollars par an. Après que le secrétaire
des services de santé (Health and Human Services) eut annoncé
en 1984 qu'un virus du SIDA avait été découvert
et qu'il pourrait affecter le grand public, les dépenses
relatives à la recherche, au traitement et à la
prévention du SIDA grimpèrent spectaculairement,
jusqu'à atteindre 2.9 milliards de dollars pour l'année
fiscale en cours.
Effondrement immunitaire
En tant que syndrome défini par différentes maladies
conventionnelles, le SIDA était conçu comme le résultat
d'une déficience sous-jacente du système immunitaire.
Chez beaucoup des premiers patients, l'anomalie principale semblait
consister en l'épuisement des cellules de l'un des sous-groupes
spécifiques du système immunitaire, les T-helper;
ces cellules répondent à la présence de microbes
envahisseurs et stimulent d'autres cellules à produire
les anticorps correspondant aux nouveaux germes. L'estimation
des niveaux "propres" aux cellules T-helper était
largement spéculative car peu de recherches avaient été
menées auparavant sur cet aspect du système immunitaire.
Mais comme le nombre approximatif des T-helper était moins
élevé chez les patients atteints de SIDA que dans
le reste de la population, on développa l'idée selon
laquelle ce syndrome était dû à quelque chose
qui détruisait spécifiquement ces cellules.
Parmi les premières causes de SIDA proposées,
il y avait les inhalations de nitrite utilisées particulièrement
par les homosexuels dans les bains publics. Un des plus anciens
travaux sur le sujet liait l'usage de ce nitrite à l'apparition
du sarcome de Kaposi, mais cette hypothèse ne put rendre
compte ni de la totalité du spectre des maladies du SIDA,
ni du SIDA des hétérosexuels et elle fut rapidement
rejetée.
Dès lors, l'intérêt se concentra principalement
sur la recherche d'un agent infectieux causant le SIDA. Le CDC
nota tout d'abord que selon le premier rapport, tous les cas initiaux
de SIDA avaient été précédés
ou accompagnés d'une infection par le cytomégalovirus,
un membre du groupe des virus herpès. Le cytomégalovirus
était connu pour sa faculté immunosuppressive et
cette piste fut suivie pendant quelques temps. Mais ce virus était
largement répandu dans la population et les patients atteints
de SIDA n'avaient pas tous été infectés par
lui. Cette hypothèse dut donc être abandonnée.
La question de la cause du SIDA fut tranchée offi ciellement
le 23 avril 1984 lorsque le Département de la Santé
annonça l'isolation du virus. Il fut d'abord appelé
Lymphadenopathy-Associated Vi rus (LAV) par les chercheurs français
qui l'avaient découvert, et Human T-cell Leukemia Virus
III (HTLV-III) par les scientifiques américains. De puis
1986, il est officiellement appelé Human Immunodeficiency
Virus (HIV). Avec la publication cruciale de Confronting AIDS
par l'Académie Na tionale des Sciences et l'Institut de
Médecine en 1986, la croyance selon laquelle le virus HIV
était la cause de l'immunosuppression du SIDA, devint le
point de vue généralement accepté par la
communauté scientifique. Aujourd'hui, l'opinion dominante
présente le virus HIV comme la cause d'une dé ficience
immunitaire qui épuise le stock de cel lules T-helper et
condamne ainsi 50 à 100% des personnes infectées
à mourir du SIDA.
Cependant, depuis 1987, un nombre croissant de médecins
et de chercheurs en sciences médicales se demandent si
le virus HIV est véritablement la cause du SIDA. Certains
de ces scientifiques dissidents se bornent à remarquer
qu'il n'a jamais été prouvé que le HIV soit
la cause du SIDA, et que son rôle reste par là-même
obscur. D'autres estiment qu'à l'évidence le HIV
ne joue aucun rôle dans le SIDA. La majorité d'entre
eux soutient toutefois que le HIV ne peut pas être la cause
du SIDA à lui tout seul, mais qu'il doit être lié
à d'autres facteurs encore non identifiés. Redoutant
la perte de leurs subventions de recherche ou la désapprobation
de leurs pairs, ces sceptiques préfèrent généralement
ne pas être cités. L'inattention des médias
a d'ailleurs largement contribué à occulter ces
points de vue qui restent ceux d'une minorité de chercheurs.
Ainsi, malgré la notoriété de beaucoup d'entre
eux, le grand public américain est encore ignorant de ces
nouvelles perspectives.
Les arguments favorables au virus
En octobre 1988, Luc Montagnier, le découvreur français
du virus, et Robert Gallo, le chef de file des chercheurs américains
penchés sur le HIV publièrent dans le Scientific
American un article qui discutait des justifications préalables
à leurs recherches. Ils prétendirent que seule l'introduction
récente d'un nouveau microbe pouvait expliquer cette augmentation
soudaine et sans égale de maladies jusqu'alors inhabituelles
chez les hommes jeunes.
On ne connaît pas encore les moyens exacts par lesquels
le HIV détruit les cellules T. Gallo et ses collègues
soulignèrent à plusieurs reprises que bien que le
mécanisme en fût encore obscur, l'évidence
d'une causalité du virus HIV dans le SIDA était
bien établie. Pour confirmer leurs dires, ces chercheurs
se fondèrent avant tout sur l'épidémiologie,
qui est l'étude de la propagation des maladies.
Ils signalèrent que les personnes atteintes de SIDA
étaient aussi celles qui avaient des anticorps pour le
HIV. Les études à long terme portant sur des personnes
atteintes d'une infection de HIV et appartenant à des groupes
à risque de SIDA, montrent effectivement une progression
vers des affections caractéristiques du SIDA.
Les partisans de l'hypothèse d'un virus du SIDA insistent
aussi sur la corrélation géographique entre le SIDA
et l'infection HIV. Le SIDA est plus répandu en Afrique
et dans des villes comme New York et San Francisco, là
où le HIV est largement présent. En revanche, on
ne trouve pas trace d'une diffusion extensive du virus ni du SIDA
en Asie, en Union Soviétique ou en Europe de l'Est.
De même, ces partisans font grand cas de plus de 1'600
enfants, plus de 1'100 hémophiles et des quelques 3'000
personnes ayant reçu des transfusions sanguines, qui -
aux Etats-Unis - ont développé le SIDA des années
après avoir été infectés par le virus.
Le Scientific American d'octobre 1988 cite l'exemple d'une famille
d'hémophiles dans laquelle le père et le fils ont
tous deux contracté le HIV et développé le
SIDA. Le cas de Ryan White est un autre exemple hautement médiatisé;
ce jeune hémophile a contracté le virus HIV, développé
le SIDA et il est mort récemment à l'âge de
18 ans. L'ancien législateur californien Paul Gann, qui
fut à la tête du mouvement anti-impôts Proposition
13, retint aussi l'attention, car il contracta le virus par transfusion
sanguine et fut fatalement atteint d'une pneumonie sidéenne
caractéristique. Comme les enfants et la majorité
des hémophiles ou des destinataires de transfusions sanguines
ne peuvent être supposés faire un usage abusif de
drogues intraveineuses ni être des homosexuels actifs, le
facteur principal de leur risque de SIDA semble être l'infection
HIV.
Bien que la plupart des virus provoque la maladie dans les
semaines qui suivent une infection aigu', le HIV, lui, n'est censé
causer le SIDA qu'après une période de latence d'environ
10 à 11 ans. A l'appui de cette thèse, les défenseurs
de la théorie d'un virus du SIDA citent les modèles
d'autres virus qui provoquent des affections chez l'homme ou chez
l'animal avec des périodes de latence de 10 à 50
ans entre l'infection et le développement de la maladie.
De tels "virus lents" passent depuis quelques années
pour être à l'origine de diverses leucémies
ainsi que d'autres cancers spécifiques des hommes et des
animaux. Le cancer cervical de la femme par exemple, est réputé
être causé par diverses lignées des virus
humains liés à l'apparition de verrues; de même,
le cancer appelé lymphome de Burkitt, est souvent considéré
comme résultant de l'action du virus de la mononucléose.
Enfin, l'on a constaté que les virus de l'immunodéficience
du singe et du chat (Simian Immunodeficiency Virus et Feline Immunodefi
ciency Virus), qui appartiennent tous deux à la même
classe que le HIV, provoquent fréquemment la maladie et
la mort de ces animaux dans des conditions jugées équivalentes
à celles du SIDA, pour peu qu'ils soient inoculés
en laboratoire.
Une hypothèse non conforme aux Postulats de Koch
Le fait que l'hypothèse d'un virus du SIDA n'ait jamais
été prouvée constitue souvent l'objection
principale des scientifiques qui la refusent. Introduits par Robert
Koch au siècle dernier, les critères classiques
pour la détermination du caractère infectieux d'une
maladie et l'attribution de sa cause à un microbe particulier
sont appelés les Postulats de Koch. Or le virus HIV, comme
le souligne Walter Gilbert , ne répond pas aux critères
des Postulats de Koch:
Postulat 1: Le germe doit être trouvé dans les
tissus affectés pour chaque cas de la maladie en question.
Toutefois, aucun HIV ne peut être isolé dans 10 à
20 pour cent des cas de SIDA. Jusqu'à ce que les méthodes
hautement sensibles de détection fassent récemment
leur apparition, l'on ne trouvait pas de trace directe du virus
dans la majorité des cas. De plus, le HIV ne peut être
isolé à partir des cellules du sarcome de Kaposi
ni à partir des cellules nerveuses des patients atteints
de la démence sidéenne.
Postulat 2: Le germe doit être isolé des autres
germes et du corps de son hôte. Les quantités de
HIV sont tellement faibles chez les patients atteints de SIDA
que le virus ne peut être isolé qu'indirectement,
après isolation d'un grand nombre de cellules du patient
et réactivation du virus. Dans les maladies classiques,
on trouve assez de virus actifs pour qu'il soit possible d'en
isoler directement à partir du sang ou des tissus lésés:
il est habituel d'en avoir entre un million et un milliard d'unités
par millilitre de fluide corporel durant la période active.
Certains virus de la même classe que le HIV se rencontrent
à raison de 100'000 à 10 millions d'unités
par millilitre, mais le HIV ne présente rarement plus de
cinq unités et jamais plus de quelques milliers par millilitre
de plasma sanguin.
Postulat 3: Le germe doit provoquer la maladie lorsqu'il est
injecté à des hôtes sains. Le HIV n'a pas
provoqué la maladie quand on l'a injecté expé
rimentalement à des chimpanzés, ni dans les cas
accidentels où il a été inoculé à
des travailleurs du secteur médical, pourtant, dans chacun
de ces cas, le virus avait infecté ses hôtes avec
succès. Si en considération de raisons éthiques
ou autres, ce troisième postulat s'avère difficile
à tester pour certains germes, il est alors nécessaire
d'en appor ter la preuve d'une autre façon, grâce
à des théra pies spécifiques qui neutralisent
le microbe et pré viennent par là-même la
maladie. Malheureuse ment, bien que de nouveaux médicaments
et vac cins soient continuellement proposés, aucune thérapie,
aucun anticorps contre le HIV n'a été capable de
prévenir les maladies du SIDA.
Postulat 4: Le même germe doit pouvoir être isolé
également à partir de son nouvel hôte. La
condition du troisième postulat n'étant pas remplie,
ce critère devient non pertinent.
Cette inadéquation aux postulats de Koch remet en question
le caractère infectieux du SIDA. En effet, les postulats
de Koch sont les critères standard en vue de la détermination
d'agents infectieux. Lorsque ces conditions ne sont pas remplies,
il faut alors pouvoir fournir à la place, des preuves équivalentes
et solides si l'on veut maintenir l'hypothèse d'un agent
infectieux.
La charge de telles preuves incombe dans ce cas à ceux
qui soutiennent que le virus HIV est la cause du SIDA; c'est ce
que fait remarquer Beverly Griffin, le directeur du Département
de virologie du Royal Postgraduate Medical School de Londres.
Cette entreprise est particulièrement ardue pour les partisans
de l'hypothèse HIV: pour pouvoir lier causalement le HIV
et le SIDA, l'on doit attribuer à ce virus des caractéristiques
très spéciales. Premièrement, le virus doit
être crédité d'une période de latence
de plusieurs années entre l'infection et le SIDA. Mais
quand une maladie est censée se produire seulement des
années après l'infection virale, il est difficile
d'être sûr que ce ne sont pas d'autres facteurs de
risque qui l'ont provoquée. Deuxièmement, les scientifiques
ont été amenés à supposer que le virus
causait la maladie par des moyens indirects, car le HIV était
manifestement absent des lésions. Cette supposition manque
toutefois de clarté et de preuve: des inventions de ce
genre peuvent virtuellement être invoquées pour accuser
n'importe quel microbe de n'importe quelle maladie.
Définition paradoxale
Un second ensemble d'arguments à l'encontre de l'hypothèse
HIV concerne la définition clinique du SIDA. Cette définition
comprend une liste de 25 maladies conventionnelles délivrée
par le CDC en 1987. Si l'une de ces maladies est diagnostiquée
en même temps que l'on découvre la présence
d'anticorps contre le HIV, le SIDA est alors également
diagnostiqué. Cette liste de maladies comprend non seulement
le sarcome de Kaposi et la pneumonie à P. carinii, mais
aussi la tuberculose, le cytomegalovi rus, l'herpès, la
diarrhée, la candidose, le lym phome, la démence
et beaucoup d'autres maladies. Si l'une de ces très diverses
maladies est trouvée seule, on la diagnostiquera probablement
sous son nom classique. Mais si la même affection est rencontrée
parallèlement à des anticorps contre le HIV, on
l'appelera SIDA. La corrélation causale entre le HIV et
le SIDA est donc une résultante de la définition-même
du SIDA.
Un autre problème se pose avec cette définition:
comment un seul virus peut-il être à l'origine d'un
spectre si varié de maladies. Harry Rubin est l'un des
multiples dissidents qui soutiennent que ces différentes
maladies n'auraient jamais dû être réunies,
et qu'il n'est pas besoin de nouveau microbe pour expliquer l'apparition
récente de ces anciennes affections parmi les groupes de
personnes ayant des comportements à risques.
La raison de la combinaison de ces maladies disparates en un
seul syndrome tient uniquement dans la supposition d'une cause
unique à leur origine: une déficience immunitaire
censée être elle-même causée par le
HIV. Toutefois, la défaillance du système immunitaire
ne peut pas rendre compte de toutes les affections figurant sur
la liste du SIDA. En particulier, une telle défaillance
n'expliquerait ni les cancers ni la démence. Bien que les
travaux expérimentaux aient montré depuis longtemps
que les cancers n'augmentent pas nécessairement en fonction
de déficiences immunitaires, beaucoup de scientifiques
s'obstinent à chercher des moyens de combattre le cancer
en utilisant le système immunitaire. Pourtant les défenses
immunitaires ne peuvent combattre que des éléments
étrangers alors que les cellules cancéreuses appartiennent
au corps du patient. De même, la démence ne peut
être directement combattue par le système immunitaire,
parce que les anticorps n'atteignent généralement
pas les tissus du cerveau. Ainsi, les microbes qui atteignent
le système nerveux central sont libres de se développer
sans interférence aucune des défenses immunitaires;
et ceci, même chez un individu parfaitement sain. Le HIV
devrait donc agir de manière beaucoup plus étendue
que celle qu'on lui attribuait pour la seule destruction du système
immunitaire; il faudrait qu'il puisse détruire les neurones
et rendre certaines cellules cancéreuses alors que simultanément,
il empêcherait la croissance des cellules immunitaires ou
qu'il les tuerait.
En réalité, toute hypothèse d'un microbe
du SIDA rencontrera ce type de difficultés.
Peu de virus détectables
Une troisième difficulté avec l'hypothèse
HIV tient dans la faible proportion de virus détectables
chez les patients atteints de SIDA. Seule une cellule T-helper
sur 10'000 est activement infectée par le virus, et ceci
même lorsque le SIDA est pleinement déclaré.
De plus, cette faible quantité de virus produite par quelques
cellules se trouve neutralisée par les mêmes anticorps
que ceux qui sont détectés par le "test du
SIDA". Il y a même moins d'une cellule sur 500 qui
contienne un virus HIV à l'état latent. Ceux-ci
ne pouvant d'ailleurs être trouvés que par l'isolation
des cellules et leur stimulation artificielle au moyen de composés
qui permettent la réactivation des virus latents. Cette
difficulté qui est souvent une impossibilité à
isoler les virus HIV des malades du SIDA, fait de la présence
des anticorps contre ce virus la seule base pratique de diagnostic.
Il est très difficile de comprendre comment le HIV pourrait
être capable de dévaster le système immunitaire
alors qu'il n'infecte jamais qu'une très faible partie
de ces cellules. Et, même si chacune des cellules infectées
était détruite par le virus, le nombre total de
cellules T perdues à chaque instant serait à peu
près équivalent à celui que l'on perd à
cause d'une coupure de rasage. De telles pertes pourraient être
soutenues indéfiniment sans affecter le système
immunitaire, car le corps produit constamment de nouvelles cellules
T à un taux nettement plus élevé. En pratique,
on ne constate pas de réactivation du virus lorsque les
patients développent les maladies du SIDA. Dans ces conditions,
l'action immunosuppressive du virus devient également très
difficile à expliquer, surtout si on lui attribue des années
de latence préalable. Après que la personne ait
produit des anticorps contre le HIV, le virus reste présent
dans les mêmes faibles quantités durant toute la
vie de l'individu; ces quantités sont d'ailleurs les mêmes
pour tous les virus de ce genre. Cela expliquerait pourquoi il
est si difficile de transmettre le virus HIV: les personnes ayant
des anticorps n'ont pratiquement aucun virus à répandre.
Quelques études décrivent de rares cas d'affection
de style grippal après infection par le HIV, mais ces patients
ont tous récupéré plutôt rapidement
après que leur système immunitaire eût créé
des anticorps contre le HIV. Cela accentue le paradoxe: comment
un virus peut-il causer la mort après 10 ans d'inactivité
alors que lors de sa première période active il
n'a causé qu'une légère affection?
Les SIDA animaux: des modèles trompeurs
Plusieurs virologues ont remarqué un quatrième
paradoxe de l'hypothèse HIV: en effet, ce virus appartient
à la classe des rétrovirus, qui sont des virus d'une
structure particulièrement simple contenant beaucoup moins
d'information génétique que la plupart des autres
virus. En effet, la majorité des virus sont dits "lytiques"
c'est-à-dire qu'ils tuent les cellules qu'ils infectent
et causent ainsi la maladie. Les rétrovirus, en revanche,
ne tuent généralement pas les cellules qu'ils infectent,
mais se contentent de copier leur information génétique
et de l'insérer dans l'ADN de celles-ci. Dès lors,
des particules virales sont constamment produites et éjectées
de ces cellules hôtes dont la survie est indispensable au
rétrovirus. Il est donc peu vraisemblable que des rétrovirus
soient à l'origine de maladies graves, et encore moins
d'affections fatales comme le SIDA qui impliquent la mort d'un
grand nombre de cellules. En réalité, depuis les
temps les plus reculés, l'ADN de chaque être humain
comporte entre 50 et 100 rétrovirus latents transmis de
génération en génération.
Dans le passé, des recherches menées par Harry
Rubin ont montré que les rétrovirus ne pouvaient
infecter les cellules qui ne se dupliquent pas. Et comme les neurones
du cerveau humain ne se redupliquent plus après les premières
années de la vie, il est fort peu probable que le HIV puisse
infecter ces cellules. Ceci expliquerait pourquoi le HIV n'a jamais
pu être isolé des neurones et confirmerait aussi
la difficulté à le déclarer comme cause de
la démence.
Harvey Bialy, rédacteur scientifique de la revue professionnelle
Bio/Technology, soutient que la structure génétique
du HIV ne diffère pas assez de celle des autres rétrovirus
pour rendre compte du comportement si divergent que l'on voudrait
lui attribuer. En effet, l'information génétique
détenue par le HIV n'est pas inhabituelle chez les rétrovirus.
Elle ne contient aucun gène si différent de ceux
des autres rétrovirus qu'il puisse être le "gène
du SIDA". De plus, le HIV ne garde pas d'information en réserve
pendant des années: il utilise la totalité de son
information génétique lorsqu'il infecte la cellule
la première fois. En d'autres termes, il n'y a aucune raison
de croire que le HIV puisse causer le SIDA 10 ans après
plutôt qu'au moment de l'infection quand il ne rencontre
d'ailleurs pas d'obstacle immunitaire.
Bialy montre aussi que les modèles animaux de la maladie
ont fait l'objet de fausses interprétations. Le SIDA des
singes par exemple n'a pas grand chose en commun avec le SIDA
humain. Non seulement ces animaux ne développent pas un
large spectre de maladies, mais ils ne subissent pas non plus
d'affections s'approchant - même vaguement - du sarcome
de Kaposi ou de la démence. De plus, on ne constate pas
de longue période de latence entre l'infection par le SIV
et le développement de la maladie. Les animaux tombent
malades dans les jours, voire les semaines qui suivent l'infection,
ou alors ils ne tombent pas malades du tout. Par ailleurs, cette
maladie ressemble plutôt à l'état grippal
observé parfois chez les humains après infection
par le HIV. Enfin, un virus comme le SIV ne cause la mort de l'animal
qu'en laboratoire, lorsqu'il est présent en grandes quantités
chez des individus constitutivement très prédisposés.
Une croyance très répandue veut que certains
rétrovirus causent des maladies mortelles après
de longues périodes de latence chez les moutons, les chèvres
et les chevaux, cependant ces virus sont en réalité
présents chez la plupart des animaux en bonne santé,
et ce n'est qu'une faible partie de ces derniers qui développent
de telles maladies, mettant ainsi en doute le rôle de ces
rétrovirus.
HIV sans SIDA
Le plus souvent, les défenseurs de l'hypothèse
HIV utilisent des arguments provenant de l'épidémiologie,
l'étude de la propagation des maladies.
La méthode la plus courante de l'épidémiologie
actuelle lors de la recherche de la cause d'une maladie consiste
à trouver des corrélations entre les phénomènes
et leurs causes possibles. La seule démarche concluante
d'un point de vue scientifique est l'étude contrôlée
: on compare deux ensembles d'individus qui présentent
tous deux les mêmes facteurs caractéristiques potentiellement
importants sauf celui de la cause possible de la maladie qui lui,
n'est présent que dans l'un des groupes. On cherche ainsi
à déterminer si ce groupe est effectivement plus
disposé à contracter la maladie. Malheureusement,
les partisans de l'hypothèse HIV ne citent que des études
épidémiologiques non contrôlées à
l'appui de leur thèse, des études qui présentent
d'ailleurs plusieurs paradoxes que n'ont pas manqué de
relever les adversaires de l'hypothèse d'un virus du SIDA.
De plus en plus, l'expérience nous montre qu'un grand
nombre de personnes infectées par le virus HIV, si ce n'est
la majorité d'entre elles, ne développera jamais
le SIDA. En 1986, le CDC estimait que le virus HIV touchait entre
1 et 1.5 million d'individus aux Etats-Unis. Ces temps derniers,
ce nombre a été corrigé par une estimation
a posteriori concluant à l'infection HIV d'environ 750'000
Américains pour l'année 1986, et d'environ 1 million
aujourd'hui. Cette révision était simplement fondée
sur des modèles de dénombrement a posteriori : puisqu'il
y avait moins de cas de SIDA que prévu, c'est que le nombre
de personnes touchées par le virus devait être moindre
que ce que l'on avait estimé à l'origine. Environ
130'000 Américains ont reçu le diagnostic du SIDA
pendant la dernière décennie et ce chiffre ne représente
que 15% de la nouvelle estimation du nombre de séropositifs
américains.
Il semble que le SIDA soit en régression à l'heure
actuelle. L'auteur de Myth of Heterosexual AIDS, Michael Fumento
- qui ne conteste d'ailleurs pas l'hypothèse HIV - remarque
un ralentissement des diagnostics de SIDA à partir de fin
1987. Une étude du modèle mathématique de
la croissance du SIDA publiée le 16 Mars 1990 par le Journal
of the American Medical Association conclut à la régression
de ce syndrome depuis 1988.
Cette tendance provoque un écart énorme entre
le nombre élevé d'individus estimés infectés
par le HIV et le nombre relativement faible de personnes effectivement
atteintes par la maladie. Afin d'assimiler cet écart, le
CDC a dû accroître régulièrement l'estimation
de la durée de la période de latence séparant
l'infection par le HIV du diagnostic du SIDA. Cette durée
est passée de trois à quatre ans en 1986 à
10 ans aujourd'hui: pour chaque année qui passe le CDC
doit grosso modo rajouter une année à la durée
de la période latente.
Pas d'épidémie en Afrique
La situation africaine est encore plus complexe et accentue
les doutes quant à l'hypothèse HIV. La plus grande
partie de l'action médiatique améri caine sur le
problème du SIDA en Afrique est fon dée sur la grande
extension de l'infection virale et non pas sur l'extension du
SIDA lui-même. Pour la totalité du continent africain
l'on ne rapporte que 41'000 cas de SIDA alors que l'infection
HIV est très largement répandue et atteint 10 à
15% de la population dans beaucoup de régions. Les parti
sans de l'hypothèse HIV essaient souvent de sou tenir que
ce faible nombre résulte d'un mauvais re censement des
cas de SIDA. Pourtant, l'Ouganda qui a la réputation de
procéder à un recensement méticuleux, ne
fait état que de 10'000 cas mortels de SIDA sur 800'000
séropositifs. Le 25 juillet 1987, un article accompagnant
l'éditorial du jour nal médical The Lancet, affirmait
que le SIDA ne constituait pas une épidémie majeure
en Afrique. Cet article était écrit par Felix Konotey-Ahulu
un médecin du Cromwell Hospital de Londres qui rentrait
d'un voyage d'étude intensive dans les régions les
plus touchées d'Afrique.
La situation est similaire à Haïti: On n'a signalé
que 2'300 cas de SIDA alors que l'infection virale est considérée
comme omniprésente. Et même si ce recensement est
inférieur à la réalité, la présence
du SIDA est bien inférieure à ce qu'impliquerait
l'hypothèse HIV.
Aucune étude épidémiologique contrôlée
n'a été à ce jour menée en vue de
déterminer si le virus HIV causait véritablement
le SIDA. Cependant, une étude raisonnablement contrôlée
portant sur 19 hémophiles a été publiée
en janvier 1989 par le Journal of Allergy and Clinical Immunology.
Cette étude montrait que l'on ne trouve pas de différence
entre les déficiences immunitaires des patients porteurs
du virus et les autres. Les ensembles étaient toutefois
trop réduits pour que les conclusions de l'étude
puissentavoir une grande portée.
Les cas d'infection accidentelle d'êtres humains par
le HIV sont particulièrement éclairants lorsqu'ils
ré sultent de circonstances autres que celles relevant
des comportements spécifiques à risque. Aux Etats-Unis,
19 travailleurs du secteur médical ont semble-t-il reçu
le virus HIV à la suite de piqûres accidentelles
ou par d'autres blessures médicales. Il a effectivement
été impossible de trouver dans leurs cas d'autres
modes plausibles de transmis sion du virus. L'un d'eux a été
déclaré atteint du SIDA en 1988 puis, rapidement,
ce diagnostic était infirmé: le client avait spontanément
récupéré. Le CDC prétend aujourd'hui
que deux des cas cités ici ont développé
le SIDA, mais aucune donnée n'est publiée à
l'appui de ces dires. Ainsi, il n'y a pas encore d'attaque confirmée
de SIDA parmi les tra vailleurs infectés accidentellement
par le virus HIV. Pourtant, l'hypothèse HIV prédisait
la conversion au SIDA de la plupart d'entre eux.
SIDA sans HIV
La détermination de la relation entre le virus HIV et
les diverses maladies du SIDA est une question importante et difficile.
Selon l'opinion dominante, beaucoup des maladies du SIDA étaient
extrêmement rares avant 1980 et ne réapparurent que
lors de l'introduction du virus HIV. En réalité,
non seulement ces 25 affections ont existé en faible proportion
durant les décennies qui ont précédé,
mais l'on continue à en faire des diagnostics en l'absence
de HIV. Ces maladies suivent d'ailleurs une croissance parallèle
à celle de leurs homonymes associés au HIV. Une
lettre parue dans le Lancet du 20 janvier et signée par
des chercheurs du CDC rapporte l'existence d'homosexuels atteints
du sarcome de Kaposi mais exempts de HIV. Robert Root-Bernstein,
professeur de physiologie à l'Université d'Etat
de Michigan a aussi publié un article dans le Lancet du
25 avril où il passe en revue la littérature traitant
de l'incidence du sarcome de Kaposi avant l'apparition du SIDA.
Depuis la première mention de cette affection en 1872,
un certain nombre de cas a été rapporté chaque
année aux Etats-Unis et en Europe. Beaucoup de ces cas
touchaient des adultes en dessous de 50 ans et même des
enfants: contrairement à ce que l'on supposait jusqu'alors,
le sarcome de Kaposi ne s'attaquait pas seulement aux personnes
âgées. Certains cas étaient fatals. Certains
cas devaient être associés à des transfusions
de sang et des pneumonies, mais en apparence, beaucoup de ces
cas de sarcome n'étaient pas liés à d'autres
affections. Root-Bernstein en conclut que dans les années
70 environ 100 cas de sarcome de Kaposi aux Etats-Unis auraient
pu être diagnostiqués comme des cas de SIDA. Cependant
ces cas n'étaient pas détectés, car le sarcome
de Kaposi n'était lui-même pas officiellement reconnu
avant l'apparition du SIDA. Le sarcome ne fut réidentifié
que dans les années 1980-81 lorsqu'on en détermina
la présence regroupée chez les jeunes homosexuels
de sexe masculin.
La pneumonie à P. carinii présente une situation
similaire. Cette affection fut identifiée en 1911. Elle
peut toucher un très large pourcentage de la population,
ainsi, une étude européenne de 1973 montre que 1
à 10% de la population présentent des signes post
mortem de cette maladie. Souvent la pneumonie à P. carinii
est associée à l'hémophilie, à la
tuberculose, aux infections cytomegalovirales, aux maladies vénériennes
et à la malnutrition. Les patients ayant reçu des
transplantations ou de fortes doses d'antibiotiques, de même
que les cancéreux sous chimiothérapie intensive
montrent une forte propension à cette pneumonie. La plupart
des cas sont pourtant associés à la malnutrition
plutôt qu'aux maladies infectieuses. Avant les années
80, cette maladie était habituellement diagnostiquée
lors de l'autopsie. Cet état de chose combiné à
la bonne disponibilité de médicaments guérissant
la pneumonie à P. carinii dans les années 70, explique
le peu de cas rapportés d'une maladie qui pourtant n'était
pas rare. Il est probable que cette pneumonie a aussi souvent
été confondue avec d'autres types de pneumonie.
Avec le début du SIDA, un diagnostic plus aisé ainsi
qu'une spécialisation de la maladie dans le milieu homosexuel
actif favorisèrent une attention renouvelée des
scientifiques sur cette affection.
Des données similaires ont été collectées
par Root-Bernstein pour la cryptococcose, lamaladie du cytomegalovirus,
et la leucoencephalopathie multifocale antérieurement à
l'épidémie de SIDA.
Une étrange répartition des maladies du SIDA
Gordon Stewart, professeur émérite de santé
publique à l'Université de Glasgow, considère
qu'au niveau épidémiologique, la grande faiblesse
de l'hypothèse HIV apparaît lorsque l'on prend conscience
du fait que même après dix ans de SIDA, le syndrome
est resté cantonné dans des groupes à risques
bien spécifiques. De surcroît, l'on constate que
les répartitions respectives des maladies du SIDA d'une
part, et du virus HIV d'autre part, ne concordent pas non plus.
Alors qu'en Afrique la répartition du SIDA est équilibrée
entre hommes et femmes, on constate qu'aux Etats-Unis, les hommes
restent de loin les plus atteints, avec plus de 90% des diagnostics
de SIDA. Depuis la découverte du syndrome, cette proportion
est restée inchangée. Le 18 avril 1990, le Journal
of the American Medical Association a souligné ce paradoxe
par une étude qui portait sur plus d'un million de jeunes
s'étant présentés au recrutement militaire
entre 1985 et 1989. Cette étude - la plus étendue
jamais réalisée en son genre - montrait que la proportion
de jeunes hommes infectés par le virus était identique
à celle des jeunes femmes bien que ces dernières
développent quatre fois moins de SIDA que les hommes du
même âge. Bref, infectés par le même
virus, les hommes sont plus susceptibles de développer
le SIDA que les femmes.
Le taux auquel les séropositifs développent chaque
année des affections diagnostiquées comme appartenant
au SIDA varie considérablement d'une population à
risque à l'autre. De l'hémophile au séropositif
impliqué dans un comportement à risque, ce taux
diffère entre 2 et 25%. Bien que les trois-quarts des hémophiles
américains soient séropositifs, il n'y en a que
6% qui ont effectivement été diagnostiqués
comme atteints de SIDA durant la décennie écoulée.
Avec 40 cas en 1989, le nombre total des diagnostics de SIDA
ne cesse de croître chez les enfants américains receveurs
de transfusions sanguines; il y a pourtant quatre ans que l'on
a réduit radicalement le nombre des infections HIV dues
à l'approvisionnement sanguin. Cet accroissement est incompatible
avec la thèse courante selon laquelle le HIV aurait une
période de latence de deux ans chez ces enfants.
Alors que l'on pourrait les croire plus exposés au virus
HIV, les travailleurs du secteur sanitaire présentent une
anomalie notable: les trois-quarts d'entre eux sont des femmes,
mais 90% de ceux à qui l'on a diagnostiqué le SIDA
sont des hommes. Encore plus étrange, le CDC a remarqué
que 95% de ces hommes atteints de SIDA et travaillant dans le
secteur sanitaire appartiennent aux mêmes groupes à
risques que 95% de tous les autres cas de SIDA.
En plus d'une répartition aberrante du SIDA s'il est
considéré comme un syndrome, les différentes
affections spécifiques du SIDA se développent sélectivement
en fonction des divers groupes à risque. Ce phénomène
se produit bien que ces divers groupes soient tous infectés
par le même virus.
Aux Etats-Unis, on ne trouve le sarcome de Kaposi par exemple
que chez les homosexuels de sexe masculin. Ce sarcome se distingue
aussi des autres affections du SIDA par le fait que lui seul montre
depuis plusieurs années une régression alors que
les autres ont sans cesse fait preuve de croissance. D'un autre
côté, la pneumonie à P. carinii a été
diagnostiquée en nombre croissant par rapport au nombre
total de cas de SIDA depuis le début du syndrome aux Etats-Unis.
Les maladies du SIDA que l'on rencontre chez les enfants semblent
appartenir aux maladies infantiles typiques comme la tuberculose,
les pneumonies ainsi que diverses infections bactériennes.
En Afrique, la maladie prédominante du SIDA est le wasting
syndrome qui est souvent appelé "slim". Aux Etats-Unis,
certains patients atteints de SIDA l'ont aussi contractée,
mais elle est encore loin d'être synonyme de SIDA.
Luc Montagnier : un revirement sensationne
Les récents développements montrent que les partisans
de l'hypothèse HIV sont en train d'amorcer un repli certain.
Luc Montagnier par exemple a publié dans la revue Research
in virology de mars 1990 un article à sensation dans lequel
il démontre l'incapacité du HIV à tuer des
cellules T en culture. Cette thèse contredit les arguments
que les partisans de l'hypothèse HIV ont tout d'abord avancés.
Dans le même article, Montagnier suggère que le
virus HIV ne peut pas causer le SIDA à lui tout seul, mais
que peut-être quelque bactérie encore non identifiée
est également impliquée. Depuis, Luc Montagnier
a épousé la suggestion de Shyh-Ching, de l'Institut
de Pathologie des Forces Armées des Etats-Unis, suggestion
émise le 11 mai 1990 dans le magazine Science et selon
laquelle la bactérie Mycoplasma incognitus qu'il venait
lui-même de découvrir pourrait jouer un rôle
dans le SIDA. A l'heure actuelle, Montagnier soutient que le HIV
et cette bactérie causent ensemble la maladie. Tout mycoplasme
rencontre cependant les mêmes difficultés que le
HIV: pour commencer, il ne pourrait être à l'origine
de toutes les maladies du SIDA; il aurait dû aussi se répandre
sans obstacle dans toute la population; et surtout, ce mycoplasme
ne présente pas assez de différences par rapport
aux autres mycoplasmes pour avoir pu développer des facultés
si peu courantes. Les mycoplasmes sont des germes relativement
communs et largement répandus dans la population, ils sont
responsables d'environ un tiers des pneumonies douces que l'on
rencontre chez l'humain. Il est possible que l'on brandisse sous
peu le HIV et le M. incognitus en les désignant comme causes
concourantes du SIDA, ce ne sera malheureusement qu'une invention
visant à combler les lacunes incontournables qui feront
toujours obstacle aux théories posant un microbe à
l'origine du SIDA.
La plus spectaculaire des études récentes sur
le SIDA est peut-être celle que le Lancet publia le 20 janvier
1990. Les chercheurs du CDC y concluaient qu'après tout,
le sarcome de Kaposi n'était pas causé par le HIV.
Cette affirmation se fondait sur l'observation d'une distribution
inégale du sarcome Kaposi parmi les différents groupes
à risques ainsi que sur le fait que cette maladie avait
été diagnostiquée indépendamment du
virus HIV chez les homosexuels américains. Ce dernier argument
est également développé ci-dessus par l'un
des auteurs du présent article (Peter Duesberg). Les données
sur lesquelles se fondaient cette communication n'étaient
pas nouvelles, mais la grande nouveauté résidait
dans la remise en question par le CDC de la causalité du
HIV pour une maladie du SIDA. Le sarcome de Kaposi n'a toutefois
pas encore été rayé de la liste des maladies
du syndrome, mais cet article du CDC a peut être ouvert
la porte à une enquête plus serrée pour déterminer
si oui ou non le virus HIV est responsable d'autres maladies du
SIDA, et aussi pour déterminer si ces maladies appartiennent
véritablement à un seul syndrome.
L'hypothèse du risque
Si des scientifiques et des médecins rejettent la thèse
de la causalité du HIV dans le SIDA que considèrent-ils
alors comme la véritable cause du SIDA? La majorité
des propositions alternatives à l'hypothèse HIV
peuvent être réunies sous le nom générique
de "l'hypothèse du risque". Le trait que ces
différentes thèses partagent, c'est la considération
des maladies sidéennes comme des affections indépendantes
les unes des autres, causées par des facteurs variés,
des maladies qui n'ont le plus souvent en commun que le fait d'impliquer
un comportement à risque. Dans cette optique le SIDA n'est
pas une maladie transmissible.
Une hypothèse du risque doit cependant pouvoir rendre
compte des récentes augmentations de plusieurs maladies
du SIDA et expliquer aussi les raisons de leur concentration dans
différents groupes à risque. Durant les 10 dernières
années, l'incidence de ces maladies a suivi une croissance
exceptionnelle dans des groupes humains chez qui antérieurement
ces maladies étaient plutôt rares.
Le sarcome de Kaposi est peut-être la maladie sidéenne
la plus compréhensible. On a vu plus haut que depuis sa
découverte, ce sarcome a existé en faible proportion
dans la population. Il est certain que plusieurs facteurs non
identifiés jouent un rôle dans l'apparition de cette
affection, mais la récente spécialisation du sarcome
de Kaposi chez les homosexuels est peut-être due à
des inhalations de nitrites appelés "poppers"
qui sont caractéristiques de ce groupe humain. Cette drogue
aphrodisiaque est devenue populaire dans la communauté
homosexuelle pendant les années 70, son usage a cependant
régressé depuis que l'on suggéra qu'elle
pouvait être à l'origine du SIDA. Il se trouve que
le sarcome de Kaposi a suivi un déclin parallèle
à ce changement de comportement. Des tests faits sur des
animaux avaient indiqué depuis longtemps la connexion entre
ces inhalations et le sarcome. En fait, les dangers évidents
présentés par ces inhalations de nitrite ont incité
le Congrès à interdire en 1988 le libre usage de
ces drogues. La piste des nitrites a été abandonnée
dans la recherche d'une cause du SIDA, car ils n'étaient
pas associés à toutes les maladies du syndrome.
On devrait aujourd'hui les définir explicitement comme
des agents spécifiques du sarcome de Kaposi.
Il y a d'autres maladies sidéennes qui ne résultent
pas forcément de problèmes immunitaires et qui trouvent
également de meilleures raisons d'être que le virus
HIV. La démence par exemple, est très probablement
causée par un usage abusif de drogues psychotropes et/ou
par une syphilis non diagnostiquée. En effet, l'augmentation
générale de l'activité sexuelle semble avoir
renouvelé les épidémies de maladies vénériennes,
y compris de la syphilis dont le dépistage reste malaisé.
Le wasting syndrome est une affection endémique caractéristique
des sidéens d'Afrique qui est due aux conditions extrêmes
de malnutrition et de manque d'hygiène sévissant
sur ce continent. La recrudescence de guerres et de régimes
totalitaires de ces dernières années a sans doute
contribué à empirer la situation. En réalité,
les maladies africaines du SIDA n'ont été incluses
à la liste que parce que le virus HIV avait déjà
été désigné en Occident comme responsable
du SIDA et qu'il était présent de manière
endémique en Afrique.
La majorité des maladies sidéennes impliquent
un certain degré de suppression immunitaire. Cette situation
est due à différents facteurs. L'usage de drogue,
et particulièrement d'héroïne, en est un. Les
drogues recréationnelles elles aussi sont couramment utilisées
par les homosexuels actifs dans les bains publics. L'alcool, l'héroïne,
la cocaïne, la marijuana, le valium et les amphétamines
appartiennent tous à l'histoire personnelle de beaucoup
de patients atteints de SIDA. Lorsque ces stupéfiants sont
combinés à une malnutrition régulière
et prolongée, comme chez beaucoup d'homosexuels et d'héroïnomanes,
cette situation peut entraîner un effondrement immunitaire
complet. Les antibiotiques peuvent aussi détériorer
le système immunitaire lorsqu'ils sont utilisés
massivement ou sur de longues périodes. Les homosexuels
actifs ont figuré parmi les plus grands usagers de ces
produits, en prenant souvent de fortes doses de tétracycline
et d'autres antibiotiques chaque soir, avant d'aller aux bains
publics.
Le médecin new-yorkais et fondateur du journal AIDS
Research , Joseph Sonnabend, a démontré que des
infections constantes et répétées peuvent
parfaitement aboutir à une défaillance du système
immunitaire résultant de cette surcharge. L'effet de plusieurs
infections simultanées serait encore plus radical. Les
homosexuels aux moeurs les plus lé gères connaissent
les attaques répétées non seule ment de tout
le spectre des maladies vénériennes, mais aussi
de toutes les formes d'hépatite, d'infections cytomegalovirales,
d'infections par le virus d'Epstein-Barr et des diverses infections
protozoaires. Ils développent généralement
plusieurs infections simultanées et souvent de façon
répétitive.
Les traumatismes corporels peuvent aussi jouer un rôle
central dans l'affaiblissement du système immunitaire.
La pratique de la pénétration anale par le poing
("fisting") est presque exclusive à la communauté
homosexuelle, et, tout comme les rapports anaux, elle endommage
souvent le rectum. Ces dommages favorisent l'accès de beaucoup
d'infections au système sanguin.
Beaucoup d'interventions chirurgicales sont immunosuppressives,
soit à cause du traumatisme lui-même ou à
cause de l'anesthésie, soit en raison d'une chimiothérapie
immunosuppressive ou même à cause du sang transfusé.
Dans ce dernier cas, la suppression immunitaire est proportionnelle
à la quantité de sang transfusée. Ces phénomènes
peuvent expliquer l'occurrence de maladies sidéennes chez
les destinataires de transfusions sanguines: qu'ils soient séropositifs
ou non, la moitié de ces patients ne survivent pas plus
d'une année à leur transfusion.
Hémophiles et enfants
Pourquoi certains individus, comme les hémophiles et
les enfants, développent-ils aussi des maladies du SIDA,
alors qu'ils n'appartiennent pas à des groupes à
risque . La réponse à cette question met en jeu
des facteurs de risque qui restent trop souvent méconnus
du grand public.
L'hémophilie a toujours été une maladie
mortelle, les récents progrès de la médecine
n'ont pas pu faire grand chose contre elle: non seulement de fréquentes
transfusions restent nécessaires, mais les anticoagulants
qu'utilisent les hémophiles présentent eux-mêmes
des caractères immunosuppresseurs. L'étude épidémiologique
contrôlée qui a été mentionnée
précédemment apporte à elle seule suffisamment
d'éléments pour soutenir l'idée d'une possible
immunodéficience inhérente à l'hémophilie
elle-même. On cite souvent le cas de Ryan White comme un
exemple de décès sidéen, toutefois, la Hemophilia
Foundation of Indiana a confirmé que sa mort était
due à des complications hémophiliennes typiques,
comme le mauvais fonctionnement du foie ou l'hémorragie
interne. En réalité, White était déjà
atteint d'une hémophilie grave qui nécessitait un
traitement quotidien aux coagulants. Il a subi aussi chaque jour
la cure AZT dont les dangers seront mentionnés plus loin.
Quant aux nourrissons à qui l'on a diagnostiqué
le SIDA, ils n'ont développé leurs affections qu'à
travers des combinaisons de facteurs de risques. Les données
publiées par le CDC montrent que 95% de ces bébés
sont nés de mères toxicomanes et/ou partenaires
sexuelles de consommateurs de drogues intraveineuses (ceci désigne
souvent les prostituées), ou alors, les bébés
sont eux-mêmes hémophiles ou destinataires de transfusions
sanguines. Les comportements à risque de leurs mères
ont fait de ces enfants des victimes, mais leurs maladies n'ont
été qualifiées de SIDA qu'à cause
de la présence d'anticorps contre le virus HIV.
En fin de compte, les rares cas de SIDA chez lesquels les facteurs
de risque sont inexistants ne dépendent que de la définition
clinique du SIDA. Pour avoir contracté l'une ou l'autre
des maladies figurant sur la liste du SIDA tout en étant
porteur du virus, ces personnes ont été décrétées
sidéennes. Dans bien des cas, cela signifie que ces patients
qui sont atteints de maladies conventionnelles ne reçoivent
pas suffisamment de soins conventionnels, mais que les médecins
préfèrent les traiter à l'AZT.
Le bouleversement comportemental des années 70
Avant et pendant la période de reconnaissance officielle
du SIDA, on remarque une croissance des affections sidéennes
parallèle à celle des facteurs de risque qui les
causent. L'homosexualité est certes plus ancienne que l'histoire,
mais en 1969 commençait avec le mouvement "gay liberation"
une période d'activité homosexuelle sans précédent.
Les plus grandes villes virent l'éclosion des bains publics
où la promiscuité sexuelle et l'usage des drogues
enregistrèrent un développement extraordinaire.
En quelques années, le nombre moyen de contacts sexuels
par individu grimpa jusqu'aux centaines voire aux milliers alors
que simultanément, la fréquence des maladies examinées
ci-avant explosait elle aussi. De fait, les épidémies
de maladies chroniques devinrent caractéristiques des milieux
homosexuels de New York et de San Francisco. La pratique du "fisting"
et les inhalations de nitrite semblent aussi avoir pris leur essor
au début des années 70.
Dans d'autres groupes, les abus de drogue s'intensifièrent
dès les années 60, et le taux de consommation de
substances comme la cocaïne et l'héroïne s'est
encore multiplié plusieurs fois depuis. Le National Narcotics
Intelligence Consumers Commitee rapporte une augmentation de coefficient
cinq pour la seule consommation de la cocaïne entre 1978
et 1988. Durant cette même période, des quantités
toujours plus importantes de sang ont été utilisées
dans des opérations chirurgicales toujours plus complexes.
Etant donné que ces augmentations spectaculaires des facteurs
de risque intervenaient précisément au sein des
groupes qui développaient les maladies sidéennes,
l'apparition de celles-ci parmi les jeunes homosexuels en 1980-81,
n'avait pas vraiment de quoi surprendre. En 1981, les cinq premiers
diagnostics du syndrome concernaient tous des grands utilisateurs
d'inhalations de nitrite, un comportement à risque pratiqué
par tous les premiers cas de SIDA.
L'hypothèse du risque explique tous les paradoxes du
SIDA et du HIV qui s'estompent lorsque l'on cesse de considérer
le SIDA comme une simple maladie infectieuse ou un syndrome mais
qu'on le définit plutôt comme un ensemble d'affections
séparées auxquelles contribuent différents
facteurs de risque. Ces différentes difficultés
de l'hypothèse HIV étaient les suivantes:
la non-conformité de l'hypothèse HIV avec les
postulats de Koch;
une longue et incohérente période de latence
entre l'infection par le HIV et le déclenchement du SIDA;
la difficulté d'expliquer comment le HIV pourrait détruire
le système immunitaire sans jamais infecter plus d'une
très faible partie de ses cellules;
le fait que le HIV ne diffère pas suffisamment des autres
rétrovirus pour que l'on puisse rendre compte d'un comportement
que l'on suppose radicalement différent;
la prédominance des hommes parmi les cas de SIDA qui
correspond aussi à une prédominance masculine chez
les grands toxicomanes;
la présence de maladies similaires à celles du
SIDA en l'absence de virus HIV;
la saturation du nombre de cas de SIDA très en dessous
du nombre de séropositifs;
l'énorme diversité des maladies sidéennes
et leur répartition dans des groupes spécifiques;
et enfin,
le fait que les études sérieuses - si rares et
incomplètes soient-elles - ne parviennent pas à
indiquer de différences entre les maladies des séropositifs
et celles des séronégatifs.
A la place de ces errements, l'hypothèse du risque suggère
que les maladies sidéennes peuvent être attribuées
à une augmentation sans précédent de la consommation
de drogues et des diverses affections liées à la
promiscuité sexuelle parmi certains groupes de population.
L'hémophilie reste un facteur de risque séparé.
L'hypothèse du risque rend compte également de
la corrélation grossière entre l'infection par le
HIV et le développement de certaines maladies; c'est parce
que le virus HIV est si difficile à transmettre qu'il est
devenu un indicateur de comportements à risque. Les personnes
les plus impliquées dans des comportements à risque
sont effectivement les plus susceptibles de propager un microbe
si inactif.
La toxicité de l'AZT
Si l'hypothèse HIV est fausse et l'hypothèse
du risque vraie, cela entraîne plusieurs conséquences
importantes dont la plus urgente concerne le traitement habituel
et officiellement approuvé du SIDA au moyen de la zidovudine
(AZT). Cette substance est censée prévenir toute
multiplication du virus HIV en empêchant le processus de
copie de l'ADN dans les cellules. Malheureusement, ce produit
détruit par la même occasion toutes les cellules
en cours de reproduction, et principalement les cellules du système
immunitaire. Si l'hypothèse du risque est valable, l'AZT
est non seulement inutile mais fatal: en effet, d'un côté
il empêche la croissance d'un virus inoffensif et de l'autre,
il cause la déficience immunitaire qu'il était censé
combattre. La réputation de ce produit n'est d'ailleurs
plus à faire en ce domaine, puisque dans les années
60, il avait été mis au point pour lutter contre
les cancers du système immunitaire: en tuant les cellules
immunitaires cancéreuses en cours de division. Ce produit
a toutefois été mis au rancart lorsque l'on s'est
aperçu en laboratoire que les souris leucémiques
traitées à l'AZT mouraient aussi rapidement que
celles à qui l'on avait épargné cette thérapie.
Certains des symptômes de la toxicité de l'AZT comme
les affections musculaires et l'anémie semblent être
aussi présents dans les cas de SIDA pleinement déclarés.
Deux études cliniques publiées ont proclamé
l'efficacité de l'AZT dans la lutte contre la pro gression
du SIDA, toutefois, l'une et l'autre ont été stoppées
tout de suite après les premiers résultats qui indiquaient
cette différence entre le groupe traité à
l'AZT et l'autre. Certains chercheurs restè rent sceptiques
face à ces études, en partie parce que le protocole
en double-aveugle n'avait pas fonctionné jusqu'au bout:
en raison des effets toxiques de l'AZT, les patients et les médecins
avaient découvert qui recevaient le traitement et qui le
placebo. En dépit de ces facteurs invalidants, les études
furent publiées. Dès la parution de la pre mière,
l'AZT fut approuvé par l'administration. Une recherche
récente de la Veterans Administra tion sur les taux de
mortalité à long terme de ces patients traités
avec l'AZT et avec le placebo n'a rapporté aucune différence
entre les deux groupes. Dans le même article, des chercheurs
français et anglais ont également exprimé
leur doutes quant à l'efficacité de l'AZT.
Malgré la toxicité de ce produit, la plupart
des médecins qui l'utilisent sont persuadés de son
utilité à court terme pour le traitement des symptômes
des maladies du SIDA. Cette confiance peut s'expliquer pour deux
raisons. Premièrement, l'AZT est un destructeur non sélectif
de cellules en division, c'est-à-dire qu'il tue aussi bien
des cellules cancéreuses que des bactéries parasites
ou que les cellules du système immunitaire. Pourtant, malgré
cette efficacité temporaire contre les maladies sidéennes
opportunistes, l'AZT ne peut que rendre le combat plus ardu à
long terme puisqu'il anéantit le système immunitaire
ainsi que d'autre cellules d'importance cruciale. Le second bienfait
apparent apporté par l'AZT tient dans un bref renforcement
du système immunitaire observé chez beaucoup de
patients en début de traitement. Ce n'est malheureusement
qu'un pseudo-bienfait: lorsque le corps est exposé à
une quelconque toxine attaquant ses cellules sanguines il réagit
en compensation par une production accrue destinée à
remplacer celles qui ont été empoisonnées.
Cet accroissement temporaire du nombre de cellules sanguines y
compris des cellules immunitaires ne peut cependant être
considéré que comme une première réaction
qui s'avérera futile face à une présence
persistante de l'AZT .
A l'heure actuelle, les agences fédérales font
la promotion de cette drogue et financent son application non
seulement à des patients dont le SIDA est déclaré,
mais aussi à ceux qui n'en manifestent pas les symptômes,
y compris à des femmes enceintes et à des enfants.
Il y a environ 50'000 patients dans le monde qui ont à
subir ce traitement. Enfin, les nouvelles thérapies du
SIDA qui sont actuellement prises en considération - le
nouveau médicament ddI (dideoxi-inosine) par exemple -
fonctionnent toutes selon le même principe. Même si
l'hypothèse HIV était valable, cette approche serait
irrationnelle, car le virus HIV est inactif au moment de l'administration
de l'AZT.
Education : Des programmes fallacieux
L'hypothèse du risque remet aussi en question l'orientation
des programmes d'information et d'éducation sur le SIDA.
Les préservatifs et les aiguilles stériles empêchent
peut-être la transmission de maladies comme l'hépatite
ou d'autres infections, mais ils ne protègent pas des effets
immunosuppresseurs de l'héroïne, de la cocaïne
et des abus d'antibiotiques. Les programmes éducatifs qui
promeuvent l'usage de préservatifs et d'aiguilles stériles
sans pour autant signaler les dangers liés aux comportements
immunosuppresseurs et en particulier à l'usage de drogues
pourraient paradoxalement encourager la propagation de la maladie.
En ce qui concerne le SIDA lui-même, l'hypothèse
du risque devrait réduire la peur de l'infection par le
virus. Les personnes qui ne pratiquent pas de comportement à
risque et qui ne sont pas atteintes de sérieux problèmes
de santé ne devraient pas se faire de souci à propos
du SIDA. Il est inutile de traquer les partenaires sexuels de
séropositifs et de chasser ces derniers du pays. Ni les
policiers ni les employés du secteur sanitaire ni les écoliers
ne devraient craindre de contracter le virus. La préoccupation
restera légitime quant aux tuberculoses, hépatites
ou autres maladies infectieuses souvent associées au SIDA,
mais l'infection par le HIV lui-même ne serait pas significative.
Sans faire de cas de l'infection HIV, on peut conseiller plusieurs
démarches aux personnes qui développent des maladies
de type SIDA. L'usage de l'AZT ou de substances similaires devrait
être évité et l'on devrait lui préférer
les thérapies conventionnelles de chaque maladie particulière.
A l'origine, ces thérapies comprenaient des médicaments
particuliers à chaque affection (contre la pneumonie à
P. carinii par exemple, on prescrivait la pentamidine) mais aussi
l'usage limité d'antibiotiques et de vaccins. Les auteurs
du présent article ne souscrivent pas nécessairement
à l'un ou à l'autre de ces procédés,
mais pensent que les médecins devraient traiter chaque
affection de manière indépendante et chercher à
en déterminer la cause dans chaque cas particulier. De
leur côté, les patients devraient réclamer
ce type d'approche à leurs médecins. Mais l'arrêt
de tout comportement à risque est sans doute l'action la
plus efficace que peuvent réaliser ces patients. Malheureusement
aucune étude n'a été entreprise en ce sens
et seuls des cas anecdotiques montrent des patients sidéens
ayant recouvré la santé après avoir amélioré
leur statut nutritionnel et mis fin à l'usage de drogues,
à la promiscuité sexuelle et à l'usage prophylactique
d'antibiotiques.
Le 10 juin 1990, le magazine Parade faisait état de
13 survivants du SIDA qui avaient vécu plus de cinq ans
depuis leurs diagnostics. La plupart d'entre eux avaient refusé
l'AZT. "C'est incroyable n'est-ce pas," disait Mike
Leonard, l'un de ces survivants, "que ce produit qui est
conçu pour vous soigner puisse aussi vous tuer."
Les questions politiques générées par
l'hypothèse du risque se rapportent principalement aux
schémas d'attribution des subventions fédérales.
Malgré 3 milliards de dollars de dépenses annuelles,
l'hypothèse HIV n'a pas encore sauvé une seule vie.
On devrait maintenant financer des études sur les causes
de chaque maladie du SIDA prise séparément ainsi
que sur les thérapies appropriées, au lieu de perpétuer
une politique scientifique qui n'attribue de subventions qu'aux
recherches polarisées sur le HIV. Ainsi, le reste des trois
milliards de dollars qui devaient être dépensés
l'année prochaine pour l'hypothèse HIV pourrait
bien être économisé et rendu aux contribuables
avant d'avoir pu faire plus de dégats.
Dr. Peter Duesberg est membre de l'Académie Nationale des Sciences.
Dr. Peter Duesberg, MCB-SH/DL Stanley Hall, UC Berkeley, Berkeley, CA 94720.
Tel: 510 642 6549; Fax: 510 643 6455.
Professor Peter Duesberg website : www.duesberg.com
Université de Californie à Berkely.
email : peter@duesberg.com
|