La transmission non sexuelle du VIH passée sous silence

Non-sexual transmission of HIV has been overlooked in developping countries.
D Gisselquist, R Rothenberg, J Potterat, E Drucker. BMJ 2002 ; 324 : 235.
Mots-clés : VIH, transmission sexuelle, transmission iatrogène.

 

De plus en plus d'études viennent contredire la conviction que la transmission du VIH est essentiellement sexuelle, et que la contamination iatrogène par le biais d'un équipement médical non stérile n'a qu'un rôle minime. En 1983, l'OMS avait identifié le risque de contamination par le biais des injections avec du matériel non stérile, alors que la contamination par le biais des rapports hétérosexuels n'était pas établi dans les pays en voie de développement.

Pendant les années suivantes, ont a constaté un taux élevé de contamination par le VIH parmi les prostituées et les personnes souffrant de maladie sexuellement transmissible. A la fin des années 80, de plus en plus de personnes ont été convaincues que plus de 90% des cas de transmission du VIH en Afrique sub-saharienne étaient induits par les rapports hétérosexuels, et que seulement 2% des cas étaient liés à l'utilisation d'aiguilles non stériles. Cette conviction ne se fonde sur aucune étude épidémiologique ayant pris en compte tous les types d'exposition, sexuelle et médicale, et en dépit du fait que l'utilisation de matériel non stérilisé est une pratique courante dans les pays en voie de développement. Plus grave encore, toutes les études sur la transmission iatrogène ont disparu des plannings de recherche concernant le VIH, et ce mode de transmission n'a plus jamais été évalué dans les études effectuées dans les pays en voie de développement ; les méta-analyses et les évaluations de la méthodologie des études font presque toujours l'impasse sur la contamination iatrogène.

L'examen de la littérature médicale montre que les chercheurs ont sous-estimé tout ce qui pouvait faire suspecter le rôle important d'une transmission iatrogène. De nombreuses études, tout particulièrement celles effectuées en Afrique, rapportent des prévalences élevées de séropositivité pour le VIH en période périnatale, impliquant une exposition nosocomiale. Elles montrent aussi que 20 à 40% des contamination peuvent être attribuées à des injections, lorsqu'on effectue le calcul des risques, les taux

constatés de contamination chez des jeunes n'ayant pas eu d'expérience sexuelle, ainsi que le nombre d'enfants séropositifs alors que leur mère est séronégative. De plus, l'absence fréquente de corrélation entre le comportement sexuel et la contamination par le VIH, et le taux très faible de transmission constaté par toutes les études effectuées sur des couples hétérosexuels monogames de statut discordant, en Afrique et ailleurs dans le monde, permettent de dire qu'il est nécessaire de réévaluer le rôle exact des rapports hétérosexuels dans la transmission du VIH.

Bien que certains facteurs, tels que la présence de maladies sexuellement transmissibles, ou l'absence de circoncision, puissent augmenter le risque de contamination hétérosexuelle, la prévalence de ces facteurs et la faiblesse de leur impact constatée dans les études permettent de penser que cela ne peut pas expliquer la prévalence actuelle du VIH rapportée en Afrique. En 1999, des organisations publiques et privées se sont regroupées en réseau afin de promouvoir une meilleure sécurité au niveau des injections. Les faits décrits ci-dessus, qui permettent de penser que l'utilisation d'aiguilles non stériles a joué un rôle majeur dans la dissémination du VIH, soulignent l'importance des recommandations faites par ce réseau pour éviter toute injection inutile, et veiller à ce que le matériel utilisé soit stérile. Ces mesures pourraient s'avérer plus efficace pour lutter contre l'épidémie de VIH que toutes les mesures actuelles focalisées sur la prévention de la transmission hétérosexuelle.


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