Niro Markoff Asistent

Niro


Le sida était resté pendant longtemps une fiction pour moi; mais en septembre 1985, mon compagnon a passé un test qui s'est révélé hautement positif. A partir de ce moment-là, le sida n'a plus du tout été une fiction, il est devenu une réalité dans ma vie. J'étais moi-même en mauvaise santé à cette époque et l'on ne parvenait pas à définir ce que j'avais; quand le test de mon compagnon est revenu positif, je me suis rendu compte qu'il fallait que je sois testée également, et, en novembre 1985, j'ai découvert que j'étais séropositive et que je souffrais de ARC (pré-sida). J'avais des diarrhées très importantes, des sueurs nocturnes qui m'obligeaient à changer les draps et les serviettes que je mettais dans mon lit plusieurs fois par nuit, d'importantes mycoses, et j'étais épuisée.
A ce moment-là, contrairement à la plupart des gens, au lieu de m'intéresser à la maladie, je me suis intéressée à ma vie. J'ai décidé de ne pas rechercher quelles étaient les maladies que je risquais d'avoir; je me suis dit : "Quand ça viendra, il sera temps de voir ce que c'est. Pour l'instant, un jour à la fois, une heure à la fois", parce que la peur de tomber malade, d'être sur un lit dépendant d'autres personnes, me créait des angoisses très intenses. Ce n'était pas de la dénégation, je ne niais pas le fait que j'étais malade, mais je me disais : "Quand la maladie se développera complètement, je retrousserai mes manches et ferai face. Actuellement, mon corps n'est pas en parfaite santé, mais je suis encore capable de travailler, de méditer et de marcher sur la plage, et c'est ce que je vais faire."
Ce qui m'a sauvée est mon contact avec la nature. D'instinct, quand les moments d'anxiété étaient trop forts, j'allais me promener sur la plage, je faisais de grandes ballades le long de l'océan. Mon contact avec la nature était la seule chose qui m'apaisait et qui contrebalançait les moments de colère, parce que j'étais très en colère d'avoir ce genre de maladie. Je me sentais coupable; je savais que très souvent je n'avais pas suivi mon intuition au sujet de mon corps, et j'avais compris que le résultat en était le diagnostic du sida. Petit à petit, ma formation, la connaissance que j'avais des différentes techniques de développement personnel, m'ont montré qu'être en colère et vivre dans l'anxiété n'allaient rien m'apporter; je me suis rappelé ce qui m'aidait à me sentir bien, parce que dans ces moments-là, la seule chose sur laquelle je focalisais mon attention était : "Qu'est-ce qui va me faire plaisir, qu'est-ce qui va me rendre heureuse maintenant?" Je savais que ce diagnostic est un genre d'ultimatum, je me rendais compte que je n'avais probablement plus que 18 mois à vivre, si j'avais la chance. Donc chaque jour était quelque chose de très précieux, que je ne pouvais pas gaspiller. Chaque jour était un cadeau et je devais vivre ce cadeau totalement.
Une chose importante aussi est que j'avais totalement accepté le fait que j'allais mourir. Je n'en ai jamais douté, je ne l'ai jamais remis en question. Je crois que c'est ce qui a produit l'effet inverse. Le fait d'être tellement consciente de ma mortalité a totalement modifié ma façon de vivre. Chaque moment était important et à chaque moment j'étais consciente du choix que j'avais de le vivre dans une misère totale, ou de le vivre avec les joies qui étaient à ma portée. Tout d'un coup, étonnemment, je me suis mis à rêver d'une vie simple; je mangeais consciemment, ne prenant que les aliments nécessaires à mon corps; je méditais beaucoup, et j'étais en relation uniquement avec les gens que j'aimais profondément. J'ai laissé tomber tout ce qui était superficiel; j'ai choisi de ne pas user d'énergie dans cette direction-là.
C'est après les deux ou trois semaines de choc pendant lesquelles j'étais comme anesthésiée, puis en colère, que j'ai commencé à méditer régulièrement et à vivre simplement. Après un mois de cette vie simple et méditative, les premières symptômes qui commencèrent à disparaître furent les diarrhées et les sueurs nocturnes, qui cessèrent d'être quotidiennes. Mon énergie aussi commençait à se renforcer. Je me rendais compte ainsi que ce que je faisais était correct. J'employais constamment mon énergie à vivre chaque jour au maximum; c'est cela qui a vraiment amené la guérison. Je n'ai pas créé de tension en disant : "Je dois guérir, je dois guérir."
En mai 1986, mon test sérologique est redevenu négatif et tous mes symptômes ont disparu. A ce moment-là, on ne connaissait personne qui soit redevenu séronégatif. Je me suis rendu compte qu'il était nécessaire de partager mon expérience, parce que je ne suis pas quelqu'un de spécial; si je peux le faire, beaucoup d'autres peuvent le faire aussi. Et il est important de changer le système de croyance actuel qui nous fait voir cette maladie comme incurable; je crois que c'est totalement faux, car chaque jour je rencontre des gens qui vivent avec le sida depuis neuf ans, sept ans, et qui vivent bien. Je crois que tout cela est une vague de panique créée par le corps médical, et nous devons nous opposer en disant ce que nous savons au sujet de la maladie.
Quand un individu est placé devant un défi qui met sa vie en question, il a une qualité particulière pour écouter ce qui est nécessaire, et le changement se fait d'une façon tout à fait différente. Mon travail n'est pas de guider les gens pour qu'ils changent leurs attitudes; mon travail est de leur rappeler ce qu'ils connaissent, leur rappeler le pouvoir guérisseur qu'ils ont à l'intérieur d'eux-mêmes, et les amener à faire confiance à ce pouvoir inconditionnellement. Nous travaillons beaucoup avec la méditation, nous retournons à l'intérieur de nous-mêmes; notre spiritualité fleurit et atteint d'autres niveaux. Et quand on est en connection avec soi-même, quand on comprend qui on est vraiment, le changement d'attitude est un fruit qui vient tout naturellement. Il s'agit alors de vivre en accord avec ce que l'on sait au fond de soi-même, et de passer du rôle de victime au rôle de maître.
Dans nos groupes de travail, on retrouve deux catégories d'individus: ceux dont la maladie est d'emblée trop avancée - leur corps est déjà trop loin pour revenir; le travail les aide à accepter leur mort, à bien terminer leur vie; leur passage est très doux, très beau; je suis toujours très émue avec eux. D'autres ont quand-même un certain ressort, et j'observe chez eux une capacité à "rebondir" face à un événement; si quelqu'un atteint du même genre de maladie doit rester trois semaines à l'hôpital, eux sont dehors en dix jours. Ils ont une connaissance d'eux-mêmes, un désir de vivre d'une force extraordinaire, ce qui les rend très honnêtes avec eux-mêmes; ce niveau d'honnêteté, d'intégrité, fait toute la différence.
La majorité des gens mis face au défi du sida le vit comme une opportunité extraordinaire. Quand je demande à mes clients : "Pourquoi êtes-vous revenu dans cette vie-ci?", la réponse est toujours la même à 100% : "Je suis venu pour aider, pour servir." Je crois que les personnes atteintes du sida sont à l'avant-garde, sur le front, pour changer le niveau de conscience de la race humaine. Quand on est en contact avec ces personnes, on est forcé de changer et de vivre dans son coeur, ce qui se fait très simplement.
Etre en contact avec le guérisseur intérieur n'est pas difficile du tout; mais vivre en accord avec ce que nous savons est beaucoup plus difficile, justement parce que nous retrouvons tous les conditionnements, toutes les émotions en travers du chemin, créant des obstacles. Nous travaillons donc intensément sur ces obstacles : d'abord accepter leur présence, puis voir leur intensité et trouver comment vivre le message intérieur malgré eux. Nous travaillons à nous détacher des émotions par des procédés nous faisant retourner à leur source. Nous nous rendons compte de la charge énergétique que ces émotions créent dans notre vie quotidienne, ce qui permet une prise de conscience du choix que nous avons : soit vivre dominé par l'énergie de ces émotions, soit vivre conscient que l'on peut faire autrement. La prise de conscience est donc très importante.
Quand je vois les résultats que les participants obtiennent, je suis extrêmement touchée; je suis profondément impressionnée de voir le pouvoir que l'être humain a en lui-même. Je crois que nous n'avons pas encore vraiment touché la dimension de ce que nous pouvons faire; c'est étonnant. Au fond, pour beaucoup de gens, le sida est l'opportunité de s'éveiller à qui ils sont réellement. Et ces gens-là vivent très bien, mieux que d'autres qui n'ont jamais reçu ce genre de défi.

Extrait de 'Sida Espoir' du Docteur Soleil. 1990, Éditions Vivez Soleil.

Ma compréhension du sida

Plutôt qu'une âme dans un corps,
deviens un corps dans une âme.
Cherche à atteindre ton âme.
Cherche encore plus loin.

Gary Zukav
The Seat of the Soul

Lorsque j'ai entendu parler pour la première fois du sida, pour moi cela ne concernait que les autres, des gens très loin de moi. Bien sûr, je ne pouvais ignorer la terrible atmosphère de panique et de fatalité répandue par les media et renforcée par la masse, puisqu'elle imprégnait l'air même que nous respirions. Mais mon attitude était celle de la plupart des gens, c'est-à-dire que j'évitais d'y penser puisque cela arrivait "aux autres", pas à moi.

Bien que me considérant alors comme "spirituellement évoluée" et croyant me consacrer à faire bouger les choses dans le monde, j'étais en fait tout aussi lâche que n'importe qui. J'avais peur de regarder en face les conséquences d'une telle épidémie sur l'ensemble du monde et je ne voulais pas affronter mes peurs et mes jugements personnels sur la maladie et la mort. J'étais loin de me douter que le sida allait devenir mon meilleur maître en ce domaine.

A une plus grande échelle, le sida a été une véritable bombe dans l'inconscient de la société, le détonnateur de toutes ses peurs et de tous ses jugements collectifs. Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui soit indifférent au sida. Certaines personnes ont une réaction de jugement, de peur, voire de pharisianisme par rapport au sida, alors que d'autres sont ouvertes, pleines de compassion et de solidarité. Chacun réagit à sa façon. Le sida a créé un mouvement de guérison dans le monde. Pratiquement toutes les couches de notre société sont concernées. C'est le début du changement drastique qui doit avoir lieu sur la planète.

Notre planète elle-même, notre Mère-Terre, souffre aussi du sida. Sa respiration (notre air), son sang (notre eau) et sa chair (notre sol) ont été pollués par de petits parasites appelés êtres humains. Le système immunitaire de notre planète a été gravement endommagé par des années d'abus de toutes sortes, de négligence et d'exploitation. L'horloge de la bombe a commencé sa course et s'apprête à nous réveiller.

Je considère le sida comme l'outil de transformation le plus puissant que nous ayons jamais eu au niveau des masses. Il nous oblige à réévaluer notre approche du fondement même de la vie telle que nous la percevons. Il ébranle la communauté médicale et ses industries annexes, il affecte les systèmes éducatif et juridique de notre société. Il nous oblige à nous questionner sur nos valeurs, notre morale et notre identité. Il nous pousse à traiter nos compagnons humains avec compassion et compréhension. Tel est le message du sida.

La lenteur tragique et l'incompétence avec lesquelles les milieux politiques et médicaux ont réagi à la crise du sida démontrent clairement à quel point notre socio-culture collective est malade. La théorie darwinienne sur la survie du mieux adapté s'est vérifiée, dans nos jungles urbaines d'aujourd'hui, par la façon dont les gens ont réagi à cette crise humaine. Nous avons tous contribué au climat de crainte et de panique mis en place par les media et leur façon dangereuse et irresponsable de manipuler le sensationnel. Nous sommes tous responsables de la discrimination haineuse qu'ont eu à subir les victimes de cette maladie.

Même si nous savions peu de chose, à l'époque, sur les risques de contagion du sida, le refus de certains soignants d'apporter la nourriture aux malades dans leur chambre, celui des ambulanciers de les transporter, et la répugnance de certains proches du malade à rendre visite à leurs chers mourants, ont contribué, par manque de compassion et de considération, à la souffrance morale et parfois à la mort prématurée du malade.

En regardant mon ami Nado dépérir, puis mourir, j'ai juré que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour transformer ces comportements de panique et de désespoir face au sida, en attitude d'ouverture, permettant de voir cette crise comme une opportunité de guérison pour tous ceux qu'elle touche. Je suis persuadée que beaucoup de gens, frappés comme moi par la souffrance et la mort de leurs proches à cause du sida, ont fait le même voeu que moi. En fait, ce sont ces mêmes personnes, travaillant bénévolement pour la plupart, qui sont devenues le pivot des services d'aide de PWA. Je souhaite exprimer ici mon admiration et mon respect à toutes ces personnes qui ont eu assez de courage pour dépasser la peur et la folie générales du début en apportant à leurs malades, leurs proches ou leurs amis une aide aimante et efficace.

A l'heure où j'écris ces lignes, je suis heureuse de constater que les choses ont changé et que le sida n'est plus regardé comme une maladie mortelle à cent pour cent. Il est considéré comme un état chronique, avec des centaines de survivants menant une vie pleine, intéressante et créative.

Ma compréhension du sida, à un niveau global, est que cette maladie est un outil d'évolution pour l'humanité sur toute la planète. Un grand mouvement de guérison est en train de se mettre en place globalement, même si, apparamment il semble ne se produire qu'individuellement. La guérison de chacun de nous contribue à la guérison de la planète. De même que le travail de la fourmi s'inscrit dans un plus grand tout, nous participons tous, à notre manière propre et unique, à l'évolution de l'humanité.

Ma propre expérience me permet d'affirmer sans le moindre doute que l'auto-guérison est le résultat direct de cette approche multisensorielle de la vie. Cette nouvelle approche ne se limite pas à nos cinq sens. Elle s'élargit jusqu'à l'intuition et inclut notre relation à Dieu, ou à une Puissance Supérieure, ou au Divin, quel que soit le nom qu'on lui donne.

A ce jour, j'ai travaillé avec des centaines de gens atteints du sida. Ces gens merveilleux, et beaucoup d'autres comme eux, sont au seuil de cette transformation de la conscience humaine. Ils contribuent tous au changement de notre inconscient collectif en nous aidant à nous tourner vers l'énergie de notre Ame.

En parlant avec eux j'ai découvert en chacun un très haut niveau d'intégrité, qu'ils soient issus d'un milieu social privilégié ou d'un ghetto de junkies. Quand je leur demande qu'elle est leur raison d'être dans cette vie, leur réponse est invariablement la même : "je suis ici pour servir". A titre d'exemple de cet esprit de service, je peux citer tous les survivants à long-terme que j'ai rencontrés et avec lesquels j'ai travaillé.

Chacun d'eux consacre une grande prtie de son temps et de son énergie en aidant bénévolement les organisations vouées au sida, ou en organisant des groupes d'entraide ou bien en témoignant contre la politique gouvernementale et les connections du FDA avec l'industrie pharmaceutique, ou bien encore, tout simplement en offrant leur présence amicale et une écoute attentive. Je tiens à préciser que chacun d'eux considère cette volonté d'aider les autres comme un facteur essentiel de ses chances de survie. Ils parlent aussi de leur esprit combatif, de leur coopération active avec les médecins et de la vigilance dans leur vie quotidienne (alimentation saine, excercices physiques, méditation, visualisation, calme, attitude positive et acceptation de leur sort). Ces gens sont allés au-delà de la logique, ils ont dépassé leurs limites physiques, et ils vivent leur vie à plein. En agissant ainsi, ils deviennent des agents puissants de transformation dans leur environnement.

J'ai le privilège, par mon travail, d'être le témoin de cette transformation au quotidien quand je vois mes patients accepter leur sort comme une opportunité d'éveil et de vie au plus haut niveau de sagesse de leur âme. En ouvrant leur coeur, l'amour se déverse et touche les gens autour d'eux qui, à leur tour, ouvrent leur propre coeur, et ainsi de suite...

Remplis d'espoir, nous constatons la transformation en nous-mêmes et sur notre planète. La vie nous a envoyé un puissant signal d'alarme et parfois nous aimerions qu'il en soit autrement. Mais les voies de Dieu sont mystérieuses et les chemins de notre évolution sont tout aussi mystérieux.

Alors, laissez votre coeur s'ouvrir à l'inspiration de ce que vous êtes - de ce que nous sommes - et voyez ce qui se passe. Etes-vous prêt à cela ? Osez-vous dire oui à cette expérience ?

Alors allez-y !

Extrait de "Comment je me suis guérie du Sida". 1992 Éditions Vivez Soleil.

Pour contacter Niro à Paris :
Tél :+ 01 47 22 99 54 ; Fax : +33 01 47 22 03 80


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