Une conspiration de silence cache la vérité sur le sida


Gordon Stewart
Professeur Emérite de la Santé Publique à l'Université de Glasgow.


The Sunday Times, London. 7 juin 1992.

Il se dit et s'écrit beaucoup de bêtises au sujet du VIH et du SIDA. Les critiques des articles récents dans "The Sunday Times" - qui mettent en doute l'hypothèse que le VIH soit la cause du SIDA - semblent croire qu'eux seuls tiennent le haut du pavé moral. La sécurité publique est tellement impliquée, clament-ils, que personne ne devrait se permettre de douter de leurs proclamations, sauf, éventuellement, les auteurs de journaux spécialisés.

Mais si le point de vue orthodoxe était manifestement - et tragiquement - faux? Et si ces journaux spécialisés refusaient de publier même des données vérifiables qui mettent en cause le point de vue conventionnel?

Pendant que les disputes se poursuivent concernant le VIH, on a fait croire au public que le SIDA va se propager inéluctablement à la population générale par la voie des rapports hétérosexuels, ce qui veut dire que tout être sexuellement actif serait en danger. Selon The World Health Organisation, dans son journal Global AIDS News, ce danger vaut "..non seulement pour les pays en voie de développement... mais aussi pour les pays industrialisés." Perspective terrifiante pour la santé et la survie de l'humanité.

Mais une analyse des chiffres officiels des cas de SIDA en Europe du Nord et aussi aux Etats Unis démontre que c'est précisement cette perspective qui est en erreur.

Le SIDA se limite presque exclusivement à certains groupes pratiquant des comportements leur mettant en contact continu avec des infections diverses et variées. Ces infections peuvent se manifester alors sous une forme puissante que nous appelons le SIDA. En dehors de ces groupes, il existe aussi certains accidents tragiques comme des transfusions contaminées et des bébés nés de mères qui ont développé le SIDA par voie de drogue ou d'autres comportements à risques.

Mais il n'existe aucune indication jusqu'à ce jour que cette maladie menace de se propager à la population générale du Royaume Uni. Cette constatation vaut aussi pour les Etats Unis, où le SIDA est apparu plusieurs années plus tôt, et où les victimes sont huit fois plus nombreuses qu'ici.

J'ai essayé de nombreuses fois de signaler le décalage entre ces faits et le point de vue "officiel" de la situation par une série d'articles envoyée aux plus importants journaux médicaux et scientifiques. Chacune de mes articles a été rejetée - et mon expérience n'est pas unique en son genre.

Il est proprement scandaleux que les plus grands journaux médicaux conspirent à étouffer tout désaccord avec les opinions et déclarations officielles.

Un nouvel exemple des mensonges et de la propagande que l'on veut faire avaler au public et à la profession médicale apparaît cette semaine dans le "British Medical Journal".

Une lettre éditoriale attire l'attention sur la haute (bien que diminuante) incidence d'infection VIH parmi les utilisateurs de drogue à Edimbourg, une situation qui est connue maintenant depuis plusieurs années. Mais la lettre ne dit pas que, selon les statistiques officielles, il n'y a eu aucun nouveau cas d'infection VIH parmi les femmes pendant tout le mois d'avril, ni à Edimbourg, ni sur l'ensemble du territoire de l'Ecosse. Il n'y a eu que quatre cas parmi les hommes - deux homosexuels, un utilisateur de drogues, l'autre avec un partenaire à l'étranger.

Voici, à petite échelle, l'image du développement du SIDA pour l'ensemble du Royaume Uni, où il n'y a eu que 112 nouveaux cas en avril, une incidence de 1 sur 500,000. C'est l'équivalent de 1 cas parmi la clientèle de 300 médecins généralistes, sauf peut-être à Londres, qui regroupe 70% des cas de SIDA au Royaume Uni, principalement dans trois ou quatre quartiers bien définis.

Depuis 1982, année où le SIDA a fait son apparition au Royaume Uni, jusqu'à fin avril 1992, le total des cas est de 5,894, dont 5,523 (94%) hommes. Des 371 femmes (6%) enregistrées comme des cas de SIDA, seulement 24 (1 femme sur 750,000) ne se trouve pas dans des groupes à risques. C'est loin d'être une épidémie. En fait, il s'agit d'une maladie assez rare, bien que douloureuse pour le pays en termes humains et aussi financières (un coût de 100,000 par cas).

Les critiques pourraient rétorquer que ces chiffres minimaux représentent tout de même l'embryon d'une épidémie qui menace notre avenir. Mais cet avenir reste indéfini, puisque le temps d'incubation entre l'infection et l'éclosion de la maladie ne cesse d'être repoussé - généralement estimé pour l'instant entre 10 et 15 ans, d'autres disent plutôt 30 ans, puisque tellement de sujets VIH-positive restent en bonne santé. La situation devient ridicule.

Plus précisément, les critiques négligent la vision de l'avenir fourni par la situation à New York City, où en octobre dernier, il a été répertorié 35,392 cas par une surveillance compréhensive depuis 1982. 29,992 des ces cas (85%) étaient des hommes. Des 5,400 cas parmi les femmes, 4,774 (89%) se trouvaient dans des groupes à hauts risques, et seulement 27 (0.5% des cas, ou 1 sur 100,000 femmes) parmi la population à moindre risque. Il convient de noter que New York City est un épicentre du SIDA, regroupant 20% de tous les cas aux Etats Unis.

Des informations sur la situation à New York sont plus détaillées que celles concernant Londres. Elles démontrent que 94% des cas de SIDA concernent les groupes à risques, et que parmi ceux-ci, 13% sont des hommes souffrant du sarcome de Kaposi - condition qui peut se produire même chez les homosexuels jeunes sans VIH, un fait qui est maintenant reconnu même par l'orthodoxie médicale - et 57% sont diagnostiqué avec une pneumonie due à la même parasite (Pneumocystis carinii) qui a particularisé les premiers cas de SIDA.

L'épidémie est sans doute le produit de certaines formes de comportements à risque. A ses débuts à New York et en Californie, le SIDA a été identifié à cause de son apparition uniquement dans certaines communautés d'homosexuels et de bisexuels masculins et d'utilisateurs de drogue.

Les hommes dans ces communautés, qui n'étaient pas typiques de tous les homosexuels, pratiquaient des rapports anaux et diverses autres formes d'activités traumatiques para-sexuelles avec des partenaires multiples, principalement dans des saunas où, par définition, toutes les infections présentes étaient partagées.

Les drogues ont aussi joué leur rôle, y compris les drogues immunosuppresseurs tels des nitrites (les poppers, en vente libre à Londres) et des antibiotiques destinés à l'auto-traitement des MST omniprésents.

Les bisexuels faisant partie de ces communautés ont transmis les infections à leurs partenaires féminins, qui, hormis les utilisatrices de drogues et les victimes de transfusion contaminées, ont été les seules à être touchée par le SIDA.

L'autre groupe à risque comporte des utilisateurs de drogues des deux sexes, qui sont touchés par des infections incontrôlables parce qu'ils se servent de drogues contaminées, partagent des seringues, et, souvent, vivent dans des conditions très peu hygiéniques. C'est dans ces deux groupes où le SIDA a commencé, et continue de sévir.

Quand j'ai pris ma retraite en 1983, le World Health Organisation m'a demandé d'examiner les aspects comportementaux et sociaux des maladies transmissibles et leur impact sur le planning familial et d'autres programmes. Ce qui m'a mené tout droit vers le SIDA.

Des informations fournies par les milieux concernés démontraient clairement que le SIDA se propageait à une vitesse alarmante à l'intérieur de ces groupes à risque, mais très rarement à l'extérieur. Des prévisions basées sur ces informations ont donné des résultats qui sont assez conformes à l'évolution réelle de la maladie - et beaucoup plus précis que les prévisions épidémiologiques fournis par les comités gouvernementaux sur le SIDA, par le Health Education Authority, et par bien d'autres experts et autorités.

Ils démontrent, par exemple, que sur la base des donnés disponibles en 1989, il a été possible de prévoir 1,326 nouveaux cas de SIDA pour le Royaume Uni en 1991 - et non les 3,690 cas (chiffre déjà réduit d'un calcul antérieur) prévu par le Cox Committee, conseillers officiels du gouvernement. Le chiffre finale des nouveaux cas en 1991, répertorié par l'excellente unité de surveillance de la Santé Publique, était de 1,370.

Le modèle simple sur lequel j'ai basé mes calculs fonctionne aussi pour New York, prévoyant correctement un cumul jusqu'à ce jour d'à peu près 40,000 cas.

Une des raisons pour les erreurs dans le point de vue officiel est l'idée reçue que le VIH était un nouveau virus qui allait fatalement se propager à la population générale.

Il y a, en effet, une corrélation certaine entre le VIH et le SIDA, mais le SIDA est plus que le VIH seulement. Le Professeur Peter Duesberg, et plus récemment, le Professeur Luc Montaigner, chef de l'équipe qui a été le premier à isoler le VIH, ont démontré que ce rétrovirus seul n'aura pas la force de tuer les cellules du système immunitaire.

L'hypothèse qui veut que le VIH soit la seule cause du SIDA ne correspond pas à la réalité clinique et épidémiologique.

Ce qui ne justifie aucune complaisance. Comme les autres maladies sexuellement transmissibles, le VIH est une indicateur de comportements à hauts risques. Le virus a aussi la puissance de créer des maladies dans le système lymphatique, et pourrait contribuer à un état d'auto-immunité dans lequel les défenses normales contre l'infection seraient déstabilisées. Mais les infections qui aboutissent à des maladies graves et la mort du SIDA peuvent survenir indépendamment du VIH.

Dans le Royaume Uni et des pays similaires, le SIDA est une maladie prévisible, principalement crée par l'homme à cause du développement sans précédent dans les années 70 de l'utilisation de drogues et des comportements sexuels qui couraient toutes sortes de risques d'infections de la bouche, l'oesophage, le poumon, l'intestin grêle, l'anus, les organes génitaux et le système circulatoire. Des drogues addictives provoquent de sérieux dommages aux défenses et à la vitalité du corps, tout comme des défauts d'immunité parmi beaucoup de membres de ces groupes à risques.

En considérant le SIDA comme une nouvelle infection virale qui menace tout le monde, et en évitant d'appliquer aux comportements à risque des sanctions sociaux, des recherches de contacts et du franc-parler que l'on applique aux autres maladies infectieuses et dangereuses, les organisations de la santé publique ont permis la continuation de tels comportements.

En même temps, par leurs déclarations inquiétantes faisant croire que tout le monde était à risque, ils ont répandu une angoisse inutile parmi des millions de gens, y compris ceux qui sont VIH-positif.

Cet article sera sans doute la cible d'une nouvelle critique furieuse de la part de l'orthodoxie médicale. Mon dernier mot sera pour eux. Je les demanderais, d'abord, de reconnaître l'extrême danger que représente l'ensemble des comportements à risque dont il est question plus haut.

Et deuxièmement, de réfléchir au danger supplémentaire qui consiste à ignorer, mépriser et supprimer des données vérifiables qui appartiennent au public, dont la compréhension et la coopération sont essentielles dès lors que l'on cherche à contrôler cette maladie crée par l'homme et qui menace la moitié la plus jeune de la population de la terre.

Découvrez de nombreux articles publiés par Gordon Stewart depuis 1983.


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